mercredi, mai 03, 2006

J'espère que vous prendrez mon souvenir en considération

Souvenir de ma première hospitalisation en hopital psychiatrique

1994, salle d’accouchement : j’accouche seule, dans la souffrance et le chagrin (je viens juste de perdre ma maman). Mon troisième bébé sur trois ans et demi !
Le congé de maternité est terminé, je reprends le travail, pas de possibilité de prendre un congé parental, on vient de faire construire, le banquier tient bien ses comptes, mon salaire est indispensable !
Je reprends donc le travail, je suis professeur des écoles, fatiguée, épuisée par mes trois grossesses rapprochées, et j’ai encore en moi la perte cruelle de ma maman. Je n’en peux plus, je n’arrive plus à assumer le travail et mes trois bouts âgés de moins de cinq ans.
Et ce qui doit arriver arrive. Je commets un geste démesuré : réanimation ! Je suis sauvée ! On m’envoie donc dans un hôpital psychiatrique : la porte s’ouvre facilement et là j’ai un tableau devant mes yeux. Des personnes hurlent, je vois des gens nus allongés par terre en train de se masturber, des patients courent sur moi et j’entends « mégots, mégots ! » Je panique, je cours vers la sortie, et je m’écroule : la porte est fermée ! Plus tard, je veux me rendre aux toilettes et là, je vois un mélange d’excréments et de cendre de cigarette sur les murs et sur les toilettes ; je ne peux même pas me soulager. Je dois trouver un système, je prends mes draps et m’y soulage et je fais l’échange. Là, pas de problème : ici l’hygiène c’est important !!! Et dire que deux jours auparavants j’enseignais encore la grammaire et les mathématiques dans ma classe, j’étais normale, et du jour au lendemain, j’ai été plongée dans le monde des fous. Tout cela parce que j’ai eu le tort d’être … désespérée !

S, 28 avril 2006