lundi, décembre 25, 2006

Je n'ai jamais parlé de ce qui m'était arrivé

Bonjour à vous,
Quand j'avais 5 ans, avec une petite voisine, nous nous sommes déguisées en nous maquillant, rouge à lèvres , fard sur les paupières et talon aiguille que nous avait prêtées la maman de ma petite camarade. Sur l'instant, ma mère n'a rien dit mais en tant qu'enfant j'ai lu dans ses yeux comme un début d'orage. Je ne comprenais pas puisque je voulais qu'elle m'admire et que je me pensais jolie.
Dès que la petite fille est repartie ma mère m'a attrapée par les cheveux en vociférant en arabe. Puis elle m'a jetée à même le sol de la chambre et m'a déflorée à coup de talons aiguille. Je précise que ces talons était hauts, pointus, la pointe en fer comme on les faisait à l'époque. Elle m'a rouée de coups et mes hurlements ont fait accourir ma soeur ainée T. qui s'est mise à hurler en voyant le sang qui coulait entre mes jambes. D'instinct, elle a compris que c'était grave et que ma mère risquait de me tuer à coups de talons.
Ma soeur n'avait que 2 ans de plus que moi, mais elle a perçu que mère n'était pas dans son état normal. et a réussi à la tirer en lui criant qu'elle allait me tuer. Ma mère est sortie de la chambre en me traitant de saloperie de pute. A l'époque je ne savais pas que ce geste avait comme signification ultime parce que dans notre culture tout ce qui concernait l'entrejambe des femmes était nié et tu.
De ce jour; ma mère m'a maltraitée avec une rare violence, en me passant à l'eau froide ou à l'eau chaude. Elle m'enfermait aussi sous un escalier des jours entiers à tel point que je perdais la notion du temps. Elle ne me donnait à manger que le strict nécessaire, un bout de pain dur avec de l'eau. Parfois la nuit elle descendait cet escalier sur lequel elle restait assise. Moi j'essayais de ne plus respirer; de ne plus bouger; de faire comme si j'étais morte. En réalité je pense que je l'étais.
La maltraitance a perduré jusqu'à ce que mon frère B. en parle à l'école. J'ai été placée à la DASS.
Je n'ai jamais parlé de ce qui m'était arrivé. Je lis beaucoup et si j'ai lu moult histoires de viol, je n'ai jamais rien lu qui ressemble un tant soit peu à ce qui m'est arrivé. Et pourtant j'ai lu beaucoup de livres sur les camps de concentration, le non de Klara, l'Oiseau Bariolé de JerZy Koscinsky et j'en passe. Mais jamais je n'ai retrouvé cet acte barbare et primaire.
Voilà ce que je tais depuis toujours mais je ne voudrais mourir dans ce silence.
Merci de m'avoir lue.
S.