mercredi, janvier 30, 2008

Marie Christine R. 51 ans

MOUGINS le 27 décembre 2007

Monsieur Estrade,

Lorsque je suis allée à la soirée des écrivains à Mougins en juin 2007, je ne pensais pas un instant rencontrer un psychanalyste. Peu de temps avant, j’avais perdu mon père en mai 2007 d’une maladie que je ne souhaite pas à mon pire ennemi : la maladie d’Alzheimer. J’étais donc encore à cette époque un peu fragile et j’avais sollicité l’aide d’un de vos confrères pour « passer le cap ». Quand j’ai vu le titre de votre dernier livre de l’époque en allemand « ces souvenirs qui nous gouvernent » j’ai été saisie de curiosité car j’ai toujours considéré que les souvenirs laissent des traces dans la vie. J’ai failli ne pas acheter ce livre, en me disant que ce n’était pas le moment étant donné les circonstances. Je me suis laissée convaincre car en tant que bon professionnel de la communication vous m’avez d’abord parlé de mon collier africain, avant de me parler du reste. J’ai admiré votre habileté de communicant sans toutefois considérer cela comme surfait.
Aussi, je ne pouvais pas terminer l’année 2007 sans vous faire part des événements qui ont suivi cet achat. Pour terminer l’introduction et me présenter, je suis cadre infirmier enseignant, depuis ma sortie du diplôme d’Etat je me passionne pour tout ce qui concerne le fonctionnement du psychisme humain. C’est un long chemin, à la fois autodidacte et thérapeutique, qui m’a amené à découvrir que j’avais surtout envie de faire connaissance avec moi-même.
Je reviens donc à l’objet de ce courrier : votre livre. J’ai joué le jeu des souvenirs en croyant avoir déjà suffisamment exploré mon être intérieur pour ne rien y découvrir (orgueil). Toute la partie théorique m’a fait une bonne révision synthétique et très claire. Par contre quelle n’a pas été ma surprise de constater dans l’antre de mes souvenirs et malgré ces années de thérapie, aucune présence de ma mère. Une des thérapies que j’ai effectuées a principalement travaillé sur la lignée maternelle (en psycho généalogie) et a mis à jour de grosses difficultés, mais je crois que je n’étais pas arrivée au stade du pardon, la mort de mon père et votre livre m’ont proposé de le vivre. Voila que tout d’un coup j’ai compris pourquoi j’avais été si mal après le décès de mon père. En effet, j’ai compris pourquoi je ressentais encore de l’agressivité envers elle, pourquoi elle m’avait laissé porter le fardeau de la maladie de mon père, pourquoi lors des derniers instants elle m’a obligé à me positionner pour que mon père ne souffre pas trop longtemps. J’ai compris que ce décès mettait à jour un problème beaucoup plus ancien que j’ai toujours eu avec elle. Cette découverte non seulement m’a été bénéfique, mais elle m’a permis de me sentir tout à fait mieux au point d’arrêter le soutien que j’avais sollicité. Même si cette version vous parait un peu trop idyllique, je crois qu’aujourd’hui, à la veille de revoir ma mère pour les fêtes, je vais enfin pouvoir vivre une relation apaisée avec elle. Je tenais à vous apporter ce témoignage, car je crois beaucoup, en tant que jungienne convaincue, qu’il n’y a pas de hasard et que les rencontres s’opèrent pour le plus grand bien de chacun.
Inutile de vous dire que par la suite j’ai acheté « comment je me suis débarrassé de moi-même » pendant l’été. Celui là, je crois l’avoir relu au moins trois fois en y redécouvrant à chaque fois des choses différentes et surtout beaucoup d’écho par rapport à ma vie. J’ai largement prêté et conseillé la lecture de ce livre, et en particulier à une de mes collègues que j’avais sentis très mal et qui vient vous voir. Beaucoup de mes étudiants l’ont apprécié Une a même dit que « c’était mieux qu’une thérapie ».

Vous m’avez fait découvrir la pensée d’Adler. J’ai beaucoup lu Freud et Jung mais peu Adler, sur lequel il semble que vous ayez beaucoup travaillé pour écrire le livre des souvenirs. Auriez vous un ou deux livres à me conseiller ?
Je serais intéressée par une réflexion autour de ces thèmes et pourquoi pas dans le cadre de conférences, échanges.

Nous sommes bien de pauvres créatures qui se débattent comme elle peuvent et je crois que la chanson de Brassens illustre parfaitement mon propos « Rien n’est jamais acquis à l’homme ni sa force, ni faiblesse, ni son cœur et quand il croit ouvrir ses bras son ombre est celle d’une croix »

Merci à vous de m’avoir à ce point touchée dans mon être profond. Votre expérience et votre culture sont un bien précieux pour les autres.


Marie-Christine R. (51 ans)

jeudi, janvier 03, 2008

Anna à propos du pardon

Il me coûte énormément d'intégrer le concept du pardon. Les enfants de parents athées, tout comme ceux des parents religieux, traînons toute notre vie une sorte d'inflexibilité frappée au fer rouge. De là mon incapacité à pardonner certaines erreurs des parents qui marquent et gouvernent si profondément la vie d'un enfant...

Montse

Voici trois souvenirs qui m'arrivent d'Espagne où mon livre Ces souvenirs qui nous gouvernent vient de sortir. Les trois souvenirs ont été traduits avec l'aimable participation de ma traductrice offiicielle catalane Amalia Prat. On voit combien l'injustice peut avoir de conséquences néfastes pour un enfant.
Patrick Estrade

Hola , acabo de leer tu libro , "Los recuerdos que gobiernan nuestra
vida". Me gustaria escribir los recuerdos que escribí cuando leí el
libro . He visto que en el blog todo está escrito en francés o
inglés , sin embargo yo soy catalana y te lo envio en castellano
(español).Si hay algún problema ya lo traduciré , muchas gracias.
Maria

Bonjour,
Je viens de livre votre livre (en langue espagnol) et j'aimerais vous transmettre les souvenirs que j'ai écris en le lisant. Je m'aperçois que le blog est en français ou anglais, mais étant catalane je vous l'envoie en castillan. S'il y a un problème, je peux vous le traduire. Merci beaucoup.
Montse

RECUERDO 1
Estoy en clase y me da mucha vergüenza hablar.Tengo miedo de que si
abro la boca , van a castigarme. Me estoy haciendo un "pipi" pero no
me atrevo a decirlo. Finalmente el pipi se me escapa .Las monjas me
castigan , me quitan las bragas , me suben en una silla en medio de
la clase con las bragas en la cabeza para que todas las niñas se
rieran de mi , y como ejemplo de lo que no debe hacerse . Sólo tenia
cuatro años. Mis padres nunca se enteraron de esto .Este episodio ha
marcado mucho mi vida y a alimentado en mi complejos de
inferioridad , culpabilidad , no superados . Siempre he creido que
soy la oveja negra de la familia , no digna de tener amigos . Durante
muchos años me cuesta mucho relacionarme y conservar amistades.

PREMIER SOUVENIR
Je suis en classe et j'ai honte de parler. Je crains que si j'ouvre la bouche on ne me punisse. J'ai envie de faire pipi mais je n'ose pas le dire. Finalement, je le fais dans ma culotte. Les bonnes soeurs me punissent: elles enlèvent ma culotte, me font grimper sur une chaise au milieu de la classe en me calant la culotte sur la tête pour que toutes les autres petites filles se moquent de moi, et comme exemple de ce que l'on ne doit pas faire. Je n'avais que quatre ans. Mes parents ne l'ont jamais su, Cet épisode a profondément marqué ma vie et a alimenté en moi des complexes d'infériorité et de culpabilité non surmontés à ce jour. J'ai toujours cru être la brebis galeuse dans ma famille et de ne pas être digne d'avoir des amis. Depuis de longues années j'ai des problèmes de relation et il me coûte de conserver les amis.

RECUERDO 2
El dia de los reyes magos en mi casa es un dia mágico.Mi padre , que
es como un niño , disfruta mucho este dia. Le encanta hacer
regalos .Pero vamos a casa de nuestra tia abuela que es madrina de mi
hermana pequeña y cada año le trae un regalo muy bonito.A mi , en
cambio , me regala algo muy pequeñito y feo .Pienso que es injusto ,
es el dia de reyes y no tendria que haber diferencias .Me siento no
querida, es evidente que hay preferencias . Sin embargo , nunca se me
ha ocurrido quejarme.Mis padres tampoco dicen nada al respeto.

DEUXIÈME SOUVENIR
C'est le jour des Rois, jour magique à la maison. Mon père, comme un enfant, est vraiment ravi ce jour-là. Il adore faire des cadeaux. Mais plus tard on va chez une vieille tante qui est la marraine de ma soeur cadette, à qui chaque année elle fait un beau cadeau. Par contre, à moi, elle m'offre quelque chose d'insignifiant et pas du tout plaisant. Je pense que c'est injuste, c'est le jour des Rois et il ne devrait pas y avoir de différences. Je me sens mal aimée, les préférences sont évidentes. Néanmoins, je n'ai jamais osé me plaindre. Mes parents non plus ne se prononcent pas à ce sujet.

RECUERDO 3
Cuando tenia diez años se murió mi abuela materna.Era la única
abuela que habia conocido y la queria mucho.Yo queria ir a su
entierro pero no me dejaron ,tampoco me dejaron despedirme de ella .
Yo me sentia mayor y madura pero mis padres no lo consideraron así ,
para ellos fue un tabú , nunca hablamos de ella y yo estuve muchas
noches soñando con ella.Tuve la sensacion de tener algo pendiente .

TROISIÈME SOUVENIR
J'avais dix ans lorsque mourut ma grand-mère maternelle. C'était la seule grand-mère que j'aie connue et je l'aimais beaucoup. Je voulais aller à son enterrement mais on m'en a empêchée, et je ne pus non plus aller lui dire au revoir. Au contraire de ce que pensaient mes parents, je me sentais adulte et assez préparée, mais eux considéraient la mort un tabou, jamais on n'en parlait. Pendant très longtemps j’ai rêvé d'elle et j’ai eu l'impression d'avoir laissé quelque chose d'inachevé.